Récital Tchaikovski avec Julia Varady

Tchaikovski : Eugène Onéguine (Acte 1. Scène Tatiana/Filipievna*, Scène de la lettre), La Pucelle d'Orléans (Ouverture, Récitatif et air de Jeanne), Mazeppa (La bataille de Poltava, Berceuse de Maria, Gopak), L'Enchanteresse (Air de Nastasia acte 1, Air de Nastasia acte 4), La Dame de Pique (Air de Lisa Acte 1, Air de Lisa Acte 3)

Julia Varady (soprano), *Daphné Evangelatos (mezzo-soprano)
Münchner Rundfunkorchester
Direction: Roman Kofman
Orfeo C540 011A

Julia varady avait déjà abordé la musique de Tchaikovski au disque en 1981 avec un récital de mélodies (en russe et en français) accompagnée par le pianiste Aribert Reimann. Sur cette nouvelle gravure, elle chante non seulement les deux héroïnes de Eugène Onéguine et la Dame de Pique mais aussi des opéras beaucoup moins connus tels que la Pucelle d'Orléans, l'Enchanteresse, Mazeppa et Iolanta.

Parfaitement à l'aise dans la langue de Pouchkine, elle campe une Tatiana qui n'est plus tout à fait une jeune fille. Sa voix a maintenant gagné dans le registre grave et son style châtié et comme son intelligence du texte ne sont jamais pris en défaut. La ligne vocale et le souffle sont toujours admirables pour une chanteuse qui a déjà 40 ans de carrière derrière elle.

Parmi les raretés, l'air de Jeanne qui est souvent chanté par des mezzo-sopranos ne lui pose aucun problème de tessiture car elle a toujours eu plus de puissance dans le grave que bien des mezzos. Parmi les découvertes de ce disque, la berceuse de Maria de Mazeppa toute de délicatesse démontre que la Varady n’a rien perdu de sa maestria dans les pianissimi.

L’Enchanteresse lui offre à nouveau la possibilité d’incarner une héroïne tragique. Le couronnement du disque étant sa Lisa tragique, déchirée (que l’on espère un jour entendre intégralement). L’air du premier acte et sa prière aux étoiles a l’élan passionné de la jeune fille. Quand à l’air du bord de la Néva, sa Lisa est devenue une femme blessée. La violence de son emportement laisse présager son suicide final.

Le Chef Roman Kofman soutient la chanteuse avec économie et précision. On regrette cependant l’absence d’une plus grande pointure (Ashkenazy par exemple avec qui elle a donné de superbes concerts Tchaikovski…) qui aurait pu tirer de Varady des accents bien plus tragiques. Reste un disque à ne pas manquer aussi bien pour la leçon de chant que pour la découverte d’œuvres peu connues de Tchaikovski. Il sortira en France dans plusieurs semaines, mais il est déjà possible de se le procurer via les vépécistes d’Internet.
Christine Leteux